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La méthode patrimoniale d’évaluation des entreprises (actif net corrigé) en 2024-2025
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La méthode patrimoniale – également appelée méthode de l’actif net corrigé ou valeur mathématique – est une approche d’évaluation d’entreprise qui consiste à déterminer la valeur de l’entreprise à partir de son patrimoine. Autrement dit, on valorise tout ce que l’entreprise possède (ses actifs) puis on retranche tout ce qu’elle doit (ses passifs exigibles), afin d’obtenir un actif net représentant la valeur intrinsèque de l’entreprise . Cette approche intéresse particulièrement les , acheteurs et investisseurs souhaitant une base de valorisation « plancher » fondée sur le bilan de l’entreprise, à compléter ensuite par d’autres pour approcher le prix de futur résultant de la négociation .

En 2024-2025, la méthode patrimoniale reste un outil classique mobilisé par les experts-comptables, notaires, avocats d’affaires et experts judiciaires dans divers contextes : transmissions d’entreprises familiales, évaluations de fonds de commerce, valorisation de sociétés holding ou immobilières, etc. Cet article très détaillé explique le principe de cette méthode, les notions clés à maîtriser (actif brut, passif exigible, actif net comptable, retraitements, survaleur…), donne des exemples concrets d’application, expose ses avantages et limites, et décrit les pratiques actuelles en France – avec un focus particulier sur les spécificités parisiennes (valorisation d’un local en bail commercial à Paris, fiscalité immobilière, primes/décotes urbaines, etc.).

Sommaire

 

Principe général de la méthode patrimoniale (actif net corrigé)

Principe de base : la méthode patrimoniale vise à évaluer la valeur d’une entreprise en additionnant la valeur de l’ensemble de ses actifs (ce qu’elle possède) et en retranchant la valeur de l’ensemble de ses dettes (ce qu’elle doit). On obtient ainsi la valeur de l’actif net comptable, qui correspond aux capitaux propres de l’entreprise . Formellement :

Actif net comptable = Actif brut – Passif exigible (dettes + provisions)

où l’actif brut désigne la valeur totale des biens de l’entreprise (tels qu’inscrits au bilan, souvent en coût historique amorti), et le passif exigible représente l’ensemble des engagements à honorer par l’entreprise (dettes court, moyen et long terme, ainsi que les provisions pour risques et charges exigibles) . L’actif net comptable ainsi calculé reflète la situation nette comptable de l’entreprise à une date donnée.

Limite du bilan historique : En l’état, ce calcul utilise les valeurs comptables historiques, qui peuvent être très éloignées des valeurs économiques réelles des actifs. En effet, le bilan d’une entreprise reflète généralement le coût d’acquisition des actifs diminué des amortissements ou dépréciations passés, sans tenir compte de l’appréciation ou de la décote potentielle de ces éléments dans le temps . Par exemple, un immeuble acquis il y a 20 ans figure encore au bilan pour sa valeur d’achat amortie, bien inférieure à sa valeur de marché actuelle ; à l’inverse, du matériel informatique obsolète peut être surévalué au bilan par rapport à sa valeur vénale quasi nulle. De plus, certains éléments importants peuvent ne pas apparaître au bilan (engagements hors bilan, actifs en crédit-bail, etc.) ou à l’inverse y figurer sans réelle valeur économique pour un repreneur (certaines immobilisations incorporelles, frais comptabilisés, etc.).

Actif net corrigé (ANC) : Il est donc nécessaire d’ajuster le bilan pour obtenir une image patrimoniale plus fidèle. L’actif net corrigé correspond à l’actif net réévalué de l’entreprise, c’est-à-dire après corrections, retraitements et réévaluations de tous les postes significatifs . On part de l’actif net comptable et l’on applique les principaux retraitements suivants  :

Réévaluation à la valeur vénale des actifs dont la valeur a évolué : par exemple l’immobilier (terrains, bâtiments) souvent sous-évalué comptablement, les terrains non amortissables (souvent pris de valeur), les équipements s’il existe un marché de l’occasion, les stocks s’ils ont vieilli (décote), voire le fonds commercial (clientèle) si une estimation de sa valeur existe .
des actifs “hors bilan” : c’est le cas des biens financés en crédit-bail qui ne figurent pas à l’actif (il faut les intégrer à l’actif pour leur valeur de rachat, tout en ajoutant la dette correspondante au passif) .
Prise en compte des passifs non comptabilisés : par exemple, les engagements sociaux non provisionnés (indemnités de fin de carrière des salariés), les coûts futurs de remise en état d’un site industriel ou de dépollution, etc., qui représentent des dettes potentielles pour l’acquéreur .
Élimination des “non-valeurs” à l’actif : certains postes d’actif n’ont pas de valeur économique pour le repreneur. On pense aux frais d’établissement, frais de développement immobilisés, qui ne génèrent pas de cash futur, ou à des aménagements, marques ou brevets inadaptés à l’usage du repreneur . Ces sans valeur doivent être retirés du calcul (ou fortement décotés).
Autres ajustements courants : vérifier que les provisions pour risques et charges sont justifiées (sinon, réintégrer l’excédent en résultat après impôt ), s’assurer de la solvabilité des créances clients (déduire celles douteuses, net des provisions déjà comptabilisées) , évaluer séparément les stocks et appliquer une décote sur les invendus anciens , distinguer les subventions d’investissement acquises (assimilables à des quasi-fonds propres) de celles à rembourser (dettes) , etc.

Après ces retraitements, on recalcule l’actif net avec les valeurs corrigées de chaque poste. Le résultat est l’actif net corrigé, reflétant la valeur patrimoniale économique de l’entreprise. En formule simplifiée :

Actif net corrigé = Actif net comptable

                 + Plus-values latentes sur actifs (immos, stocks…)

                 – Moins-values latentes sur actifs

                 + Actifs hors-bilan à intégrer

                 + Dettes/Passifs omis à intégrer

                 – Actifs sans valeur à éliminer

                 ± Autres ajustements divers

Par exemple, si une PME détient un terrain acheté 100 000 € il y a longtemps, mais dont la valeur actuelle est 300 000 €, le retraitement consiste à ajouter +200 000 € de plus-value latente dans l’actif net corrigé. En revanche, si elle possède des stocks vétustes surévalués de 50 000 € au bilan mais ne valant plus que 20 000 €, on retranchera -30 000 € pour décote de stock. On intégrera aussi, le cas échéant, des engagements non provisionnés (ex : indemnités de licenciement futures estimées 80 000 € : -80 000 €). Une fois tous ces ajustements faits, on obtient un actif net corrigé beaucoup plus proche de la réalité économique.

Survaleur () : Jusqu’ici, la méthode patrimoniale “pure” ne prend en compte que les actifs identifiables et valorisables de l’entreprise. Or, une entreprise en activité peut valoir plus que la somme de ses actifs tangibles, notamment grâce à des éléments immatériels non comptabilisés : sa réputation, sa clientèle fidèle, son équipe en place, son savoir-faire, sa marque, son réseau commercial, etc. Ces éléments forment le fonds de commerce immatériel et génèrent des superprofits au-delà de la rémunération normale des actifs tangibles. La survaleur (ou goodwill) est le nom donné à ce supplément de valeur d’une entreprise lié à ces atouts immatériels .

En pratique, la survaleur peut être estimée en combinant l’approche patrimoniale et l’approche de rentabilité. Une méthode courante consiste à capitaliser les superprofits futurs de l’entreprise : on calcule la part de bénéfice annuel qui dépasse la rémunération « normale » des capitaux engagés (c’est-à-dire la rémunération qu’un investisseur exigerait pour un montant égal à l’actif net corrigé, en fonction d’un taux de rendement moyen du marché). Cette part excédentaire de bénéfice est ensuite capitalisée sur une certaine durée (par exemple 5 ans) via un coefficient multiplicateur, pour obtenir une valeur actuelle des superprofits . Ce capital représente la survaleur ou goodwill de l’entreprise . Si l’entreprise ne génère pas de surprofit (voire des sous-performances), la survaleur est nulle ou même négative (badwill), indiquant que l’entreprise vaut moins que son actif net (cas d’une activité déficitaire dévalorisant le patrimoine).

Méthode patrimoniale vs méthode du goodwill : On distingue ainsi la méthode patrimoniale strictement dite – se limitant à l’actif net corrigé (valeur dite d’inventaire) – et la méthode patrimoniale élargie ou méthode mixte, qui ajoute une survaleur pour tenir compte de la capacité bénéficiaire de l’entreprise. Dans le langage des experts, on parle parfois de méthode de l’ANCC (Actif Net Comptable Corrigé) seule, versus méthode de l’ANCC + goodwill. Cette dernière donne une valeur globale se situant logiquement entre la pure valeur patrimoniale et la pure valeur de rendement , puisque elle ajoute une composante de rentabilité à la base patrimoniale.

Résumé des notions clés : Pour clarifier ces termes importants, voici les définitions synthétiques des notions utilisées :

Actif brut : total des biens et droits possédés par l’entreprise, inscrits à l’actif du bilan (immobilisations incorporelles, corporelles, financières, stock, créances, trésorerie…), généralement valorisés à leur coût historique net des amortissements.
Passif exigible : ensemble des dettes certaines de l’entreprise inscrites au passif du bilan et exigibles à plus ou moins brève échéance (dettes financières, dettes fournisseurs, fiscales et sociales, provisions pour charges à payer, etc.). On exclut de ce terme les capitaux propres (qui sont les ressources non exigibles apportées par les associés ou générées par l’entreprise).
Actif net comptable (ANC) : différence entre l’actif brut et le passif exigible. C’est la situation nette ou les capitaux propres comptables de l’entreprise . On y inclut les réserves et reports à nouveau, et les provisions réglementées assimilables à des réserves. Formule : ANC = total actif – total dettes réelles .
Retraitements (ou corrections) : ajustements apportés aux valeurs comptables pour refléter la valeur économique réelle. Ils incluent la réévaluation des actifs sous/sur-évalués, l’intégration des éléments hors bilan, l’élimination des actifs sans valeur, la prise en compte des passifs omis, etc. .
Actif net corrigé (ANCC) : actif net après retraitements. C’est la valeur patrimoniale corrigée ou valeur d’inventaire réévaluée de l’entreprise. Formule : ANCC = ANC + total des plus-values latentes – total des moins-values + autres ajustements. Il représente le montant qu’il faudrait pour reconstituer l’entreprise et ses actifs à leur valeur du marché, net de dettes .
Survaleur (goodwill) : valeur immatérielle liée aux éléments extra-comptables de l’entreprise (réputation, clientèle, savoir-faire, etc.), mesurant la capacité de l’entreprise à générer des résultats supérieurs à la normale . Peut être calculée en capitalisant les superprofits futurs au-delà de la rémunération normale de l’ANCC . Cette survaleur vient s’ajouter à l’ANCC dans les méthodes dites mixtes.

Exemples concrets d’application de la méthode patrimoniale

Pour mieux comprendre comment appliquer la méthode patrimoniale, prenons trois cas de figure contrastés : (1) une PME possédant un important patrimoine immobilier, (2) une société d’exploitation classique principalement évaluée sur sa rentabilité, et (3) un fonds de commerce (petite entreprise commerciale locale). Ces exemples illustrent les modalités de calcul de l’actif net corrigé et ses différences avec la valeur économique effective.

Exemple 1 : PME industrielle avec patrimoine immobilier.

Soit une PME qui exploite une usine et est propriétaire des bâtiments et terrains correspondants. Son bilan comptable présente un actif immobilisé important, amorti depuis des années. Lors de l’évaluation, on constate : le terrain acquis pour 500 000 € en 1995 vaut désormais environ 2 M€ sur le marché ; le bâtiment industriel, amorti comptablement à zéro, a en réalité une valeur vénale de 800 000 € (malgré son ancienneté) ; par ailleurs l’entreprise détient des participations financières mineures inscrites pour 1 € symbolique mais dont la valeur de marché est de 100 000 €. Du côté du passif, on note également la présence d’une plus-value latente significative : si le terrain ou le bâtiment étaient cédés, l’entreprise devrait théoriquement payer l’impôt sur les sociétés sur la plus-value (sauf régime spécifique), générant une fiscalité latente. En appliquant la méthode patrimoniale, l’évaluateur va réévaluer l’actif : +1,5 M€ sur le terrain, +800 k€ sur le bâtiment, +100 k€ sur les participations, etc. L’actif net corrigé de la PME sera donc très supérieur à son actif net comptable de départ. Par exemple, si l’ANC initial était de 1 M€, les retraitements pourraient le porter à ~3,4 M€ (ajout des 2,4 M€ de plus-values latentes). Il conviendra ensuite d’examiner si ces plus-values doivent être ajustées d’un abattement pour fiscalité latente : en pratique, les experts considèrent souvent que pour les actifs indispensables à l’exploitation (ici l’usine en fonctionnement), on n’a pas à déduire la fiscalité latente puisque l’entreprise n’a pas vocation à les vendre immédiatement . En revanche, pour des actifs non stratégiques ou détenus via une holding, on pourra déduire l’impôt latent afin de valoriser l’actif net “net de taxes” pour un repreneur . Dans notre exemple, le bâtiment étant nécessaire à l’activité, on pourrait ne pas tenir compte de l’impôt latent, tandis que pour un terrain ou une participation non indispensable, on l’estimerait et on le retrancherait. Au final, la méthode patrimoniale donnera pour cette PME une valorisation plancher élevée, reflétant la solidité de son patrimoine. Cette approche est d’ailleurs souvent utilisée pour les entreprises patrimoniales ou holdings immobilières, dont la valeur réside principalement dans l’importance des actifs détenus . Notons que si l’on estime que l’entreprise dégage en plus un bénéfice récurrent au-delà de la simple rémunération de ces actifs (cas d’une exploitation rentable), on pourra ajouter une survaleur correspondant à la rentabilité excédentaire (voir plus loin). Mais dans bien des cas, la valeur patrimoniale corrigée constitue la valeur minimale à discuter entre cédant et repreneur .

Exemple 2 : Société d’exploitation classique (PME de services sans actifs significatifs).

Considérons maintenant une entreprise de services (par ex. une agence digitale) qui n’a presque pas d’actifs corporels : elle loue ses locaux, son principal actif réside dans ses ordinateurs et son fonds commercial (clientèle, réputation). Son bilan comptable affiche un actif net modeste (essentiellement de la trésorerie accumulée et du matériel amorti) et des capitaux propres de, disons, 100 k€. Pourtant, l’entreprise est très rentable – elle génère 200 k€ de résultat net par an – et possède un portefeuille clients stable. Appliquer strictement la méthode de l’actif net corrigé conduirait à valoriser la société autour de 100 k€ (en ajustant à la marge quelques postes du bilan, comme éliminer 10 k€ de frais d’établissement sans valeur et réévaluer 5 k€ d’ordinateurs d’occasion : l’ANCC resterait faible, peut-être ~95 k€). Ce montant est dérisoire par rapport à la valeur économique réelle de l’entreprise compte tenu de sa rentabilité. En effet, un acheteur serait prêt à payer bien plus que 100 k€ s’il peut espérer 200 k€ de bénéfices annuels. Ici, la méthode patrimoniale pure n’intègre pas le potentiel économique futur, et se révèle inadaptée seule . Dans la pratique, on va donc compléter l’approche patrimoniale par l’estimation d’une survaleur (goodwill) liée à la clientèle et au savoir-faire. Par exemple, on pourrait estimer que sur les 200 k€ de bénéfices annuels, une part correspond à la rémunération normale des actifs tangibles (mettons 5% de 95 k€ ≈ 5 k€, négligeable dans ce cas), et le reste 195 k€ est un superprofit lié aux facteurs immatériels. En capitalisant ces 195 k€ sur, par exemple, 5 ans avec un taux de rendement de 15%, on obtiendrait une survaleur d’environ 650 k€ (simple illustration). La valeur totale de l’entreprise par une méthode mixte serait alors ANCC (95 k€) + survaleur (650 k€) ≈ 745 k€. Cette valeur reflète mieux le prix qu’un acheteur pourrait proposer. Cet exemple montre que pour les sociétés d’exploitation à forte rentabilité et peu d’actifs tangibles, la méthode patrimoniale seule donne la valeur minimale, et doit être complétée par des méthodes de rendement (EBITDA, DCF…) pour estimer la valeur de la clientèle et du potentiel futur . D’ailleurs, la jurisprudence française rappelle que “le montant de l’actif social n’est que l’un des éléments” pour apprécier la valeur d’une entreprise, sous-entendu qu’il ne suffit pas à lui seul . Une entreprise très prospère avec peu d’actifs vaudra bien plus que son actif net, et inversement une entreprise déclinante avec un gros patrimoine peut valoir moins que son actif net si ses résultats futurs ne permettent pas de rentabiliser ce patrimoine .

Exemple 3 : Évaluation d’un fonds de commerce (petit ).

Le cas d’un fonds de commerce – par exemple un restaurant ou une boutique – illustre la méthode patrimoniale appliquée à une cession d’ ou TPE. Un fonds de commerce comprend classiquement des éléments incorporels (droit au bail, nom commercial, clientèle dite achalandage, enseigne, etc.) et des éléments corporels (matériel, mobilier, stocks) éventuellement détenus par l’exploitant. Supposons une petite boutique à Paris dont le propriétaire souhaite céder le fonds de commerce. Sur le bilan fiscal de l’entreprise individuelle, on trouve un peu de matériel amorti et du stock, pour une valeur nette comptable totale de seulement 20 000 €. En revanche, la boutique est idéalement située dans un quartier commerçant, avec un loyer ancien très faible comparé au marché (par ex. 800 €/mois alors que le marché locatif pour ce local serait de 3 000 €/mois). La clientèle est régulière et la réputation bien établie dans le quartier. Si l’on se contentait de l’actif net comptable, on valoriserait le fonds ~20 000 € (en reprenant stock + matériel net). Bien évidemment, le cédant en voudra beaucoup plus, car le principal actif du fonds est immatériel : le droit au bail avantageux et la clientèle. Pour évaluer ce type de fonds, les experts et notaires utilisent souvent une approche patrimoniale analytique : ils vont estimer séparément la valeur de chaque composant du fonds de commerce puis faire la somme.

Valorisation du droit au bail : Le droit au bail (droit pour le repreneur de bénéficier du bail commercial en cours et de sa modération de loyer) se valorise généralement en capitalisant l’avantage qu’il procure. La méthode usuelle consiste à prendre la différence entre la de marché du local et le loyer annuel actuel payé, puis à multiplier ce différentiel par un coefficient d’ . Dans les emplacements très prisés de Paris, ce coefficient peut être élevé (par exemple 8 à 12 pour une adresse prestigieuse type Champs-Élysées ). Dans notre exemple, la différence de loyer annuel est (3 000–800)×12 = 26 400 € par an en faveur du locataire en place. Si on applique, disons, un coefficient 10 (emplacement de premier ordre), on obtient une valeur de droit au bail d’environ 264 000 €. Ce chiffre représente ce qu’un commerçant serait prêt à payer pour bénéficier d’un loyer si bas dans ce quartier. Remarque : les tribunaux considèrent souvent que le droit au bail constitue la « valeur plancher » d’un fonds de commerce déficitaire, pouvant être son seul actif monnayable . Ici, même si l’activité du magasin était faible, le droit au bail vaudrait tout de même ~264 k€.
Valorisation des autres incorporels : Le nom commercial et l’enseigne sont généralement cédés avec le fonds ; on ne les valorise pas séparément, leur valeur est incluse dans celle de la clientèle/fonds commercial global. En revanche, si le commerce possède une marque déposée réputée ou des brevets, ceux-ci peuvent faire l’objet d’une évaluation spécifique (par capitalisation des redevances qu’ils pourraient générer, par exemple) . Dans notre boutique imaginaire, il n’y a pas de marque brevetée distincte du nom d’enseigne local. On considère donc que la clientèle est l’élément incorporel principal à valoriser (et on l’a partiellement estimée à travers le droit au bail, puisque un emplacement avantageux se traduit en part par une clientèle captive du lieu).
Valorisation des actifs corporels : On évalue ensuite le matériel et les agencements (rayonnages, comptoir, etc.) d’après leur valeur d’usage ou de revente. S’ils sont en bon état mais amortis comptablement, on peut retenir une valeur d’occasion non négligeable . Supposons qu’on estime l’ensemble du matériel et mobilier à 15 000 € sur la base du marché de l’occasion (au lieu de 5 000 € net comptable, par exemple). De même, on valorise le stock de marchandises à sa valeur de réalisation : si le stock est frais et tournant normalement, on le prend à sa valeur comptable ; s’il comporte des invendus ou des produits démodés, on applique une décote (par ex. –30% sur certains lots) . Imaginons un stock valorisé 10 000 € après décote.
Calcul de la valeur du fonds de commerce : En additionnant les composantes : droit au bail (~264 000 €) + matériel (15 000 €) + stock (10 000 €) + éventuellement quelques milliers d’euros pour la clientèle résiduelle au-delà du seul avantage de loyer (difficile à chiffrer isolément ici) – on obtiendrait une valorisation globale aux alentours de 290 000 € pour le fonds de commerce. Ce montant sera confronté aux autres méthodes (notamment les pratiques de marché par barèmes ou multiples de chiffre d’affaires) pour s’assurer qu’il reste cohérent avec la capacité bénéficiaire du commerce. Par exemple, si la boutique génère 60 000 € de bénéfice par an, un acquéreur payant ~290 k€ reprendra un commerce avec un rendement apparent d’environ 20%, ce qui peut sembler raisonnable compte tenu du risque commercial.

Cet exemple met en lumière que, pour les petits commerces, la méthode patrimoniale revient à évaluer séparément les actifs corporels et incorporels (droit au bail, stock, matériel, etc.) du fonds de commerce. On reconstitue en quelque sorte la valeur de chaque élément du patrimoine cédé. Il s’agit bien d’une approche “patrimoniale”, mais qui inclut explicitement la valorisation d’éléments incorporels majeurs (clientèle, emplacement), sans se limiter aux chiffres comptables. En France, les Chambres de Commerce, notaires et experts spécialisés en évaluations de fonds de commerce recommandent cette méthode multicritère pour approcher au plus juste la valeur, tout en rappelant de rester prudent face aux facteurs d’environnement (arrivée d’un concurrent, travaux de voirie prévus, évolution du quartier…) qui peuvent impacter la pérennité de la clientèle .

 

Avantages de la méthode patrimoniale

La méthode de l’actif net corrigé présente plusieurs attraits pour les parties prenantes d’une transaction :

Simplicité et clarté : Son principe est facile à comprendre (valeur des biens moins dettes) et les calculs sont relativement abordables. Cela facilite le dialogue entre le cédant et le repreneur, objet par objet . Chaque ajustement (réévaluation d’un actif, suppression d’une non-valeur, etc.) peut être discuté concrètement, ce qui rend la négociation transparente sur les éléments tangibles.
Vision intrinsèque et plancher de valeur : L’ANCC fournit la valeur intrinsèque minimale de l’entreprise, indépendante des aléas de marché. Pour une petite entreprise rentable mais sans excès, cette valeur patrimoniale corrigée correspond souvent au plancher en dessous duquel un cédant ne voudra pas descendre . De même, un repreneur y verra le coût de reconstitution du business (valeur de remplacement des actifs) ou ce que lui rapporterait une liquidation des actifs net de dettes . C’est donc un repère utile : racheter une entreprise « pour son actif net » est généralement considéré comme une bonne affaire (on paye juste ses biens, sans prime) .
Utile pour certaines situations : La méthode patrimoniale s’avère particulièrement pertinente pour évaluer les sociétés à dominante d’actifs. Par exemple, pour une société foncière, une holding financière ou une exploitation agricole avec beaucoup de terres, l’essentiel de la valeur vient du patrimoine, donc l’ANCC est l’indicateur numéro un . De même, en cas de liquidation envisagée, l’ANCC (après éventuelles décotes de cession rapide) donne une bonne idée de ce que récupérera le cédant en vendant tout “au détail” .
Base objective pour montage juridique et fiscal : Connaître l’actif net corrigé est indispensable dans bien des opérations : augmentations de capital par apport en nature (il faut évaluer les apports), sorties d’associés (rachat de parts), calcul de la valeur de parts pour l’ISF/IFI ou les successions/donations, etc. C’est souvent la première approche utilisée par les experts, ne serait-ce que pour avoir un ordre de grandeur prudent.
Repérage des faiblesses du bilan : Enfin, le travail d’audit patrimonial qu’implique cette méthode (analyse des actifs et passifs, hors-bilan, etc.) est en soi bénéfique. Il permet de détecter d’éventuels problèmes comptables ou financiers (provisions sous-estimées, actifs surévalués ou obsolètes, engagements cachés) et d’assainir le périmètre avant cession. Ce nettoyage sécurise la transaction via, ensuite, la garantie d’actif-passif.

 

Limites et critiques de cette méthode

Malgré ses qualités, la méthode patrimoniale comporte d’importantes limites qu’il faut avoir à l’esprit :

Vision statique du passé, pas du futur : C’est une photo à l’instant T de la valeur des actifs, fondée sur le passé (coûts historiques réévalués). Elle n’intègre pas la capacité bénéficiaire future de l’entreprise . Une entreprise peut avoir un actif net élevé et pourtant un avenir sombre (elle ne dégagera pas assez de profits, rendant son actif net peu “rentable” pour un repreneur), ou inversement un actif net faible mais des perspectives florissantes. La méthode ignore totalement ces dynamiques et pourrait induire en erreur si utilisée seule (ex : start-up à fort potentiel valorisée quasi nulle à l’ANCC, ou société en déclin valorisée cher en patrimoine) .
Aucune évaluation directe de la rentabilité : Dans le même esprit, l’ANCC ne dit rien du délai de retour sur investissement pour l’acheteur. Deux entreprises au même actif net corrigé peuvent avoir des profits très divergents. Or un repreneur raisonne en “combien va me rapporter ce que je paye”. La méthode patrimoniale ne donne aucune indication sur la rentabilité future ni sur la capacité à rembourser un emprunt d’acquisition par exemple . C’est pourquoi elle doit être complétée par des méthodes de rendement (EBITDA, flux de trésorerie…) pour estimer un prix de marché acceptable.
Pas de prise en compte de certains intangibles : Si on s’en tient strictement à l’actif net corrigé sans survaleur, on passe à côté de la valeur de la clientèle, de la marque, du savoir-faire interne… qui sont souvent les principaux leviers de création de valeur. La méthode patrimoniale classique sous-évalue donc les entreprises à forte composante immatérielle, à moins d’introduire une estimation annexe de goodwill.
Sensibilité des évaluations d’actifs : La fiabilité de l’ANCC dépend de la pertinence des retraitements. Or, évaluer la valeur vénale de certains actifs n’est pas trivial. Par exemple, pour un immeuble d’entreprise, l’expert doit estimer le prix de marché (via des comparables ou des méthodes de rentabilité immobilière) – ce qui peut varier selon les hypothèses. Idem pour estimer un droit au bail ou la valeur d’un brevet. Il y a donc une part de subjectivité et d’incertitude dans les corrections apportées. Deux évaluateurs pourraient aboutir à des chiffres différents s’ils n’ont pas la même expertise sectorielle. On réduit cette incertitude en faisant éventuellement appel à des spécialistes (experts immobiliers, évaluation de marques, etc.), mais cela complexifie alors la méthode qui se voulait simple.
Influence des normes comptables et de la fiscalité : Le montant de l’actif net peut être affecté par des choix comptables (amortissements accélérés ou non, provisions prudentes ou non). L’analyste doit corriger ces biais. De plus, la prise en compte ou non de la fiscalité latente sur les plus-values peut modifier sensiblement la valeur retenue (avec ou sans décote fiscale). Il faut aussi faire attention aux normes fiscales en vigueur : par exemple, l’administration fiscale française considère que pour valoriser des titres de société, la valeur mathématique n’est qu’un élément d’appréciation et doit souvent être pondérée avec d’autres approches . De même, en cas de valorisation pour une donation/succession, l’administration intègrera des décotes éventuelles (minorité, illiquidité) sur l’ANCC brut. La méthode patrimoniale “pure” ne tient pas compte de ces ajustements de contexte si on ne les applique pas a posteriori.
Peu pertinente pour certaines entreprises : En résumé, l’approche patrimoniale n’est pas adéquate pour les entreprises dont la valeur repose surtout sur la profitabilité et la dynamique (start-ups, sociétés innovantes, entreprises en forte croissance avec peu d’actifs fixes). Dans ces cas, elle sous-évalue gravement la réalité économique . À l’inverse, elle peut surévaluer des sociétés “riches” en capital mais peu rentables (cas d’entreprises en déclin qui ont accumulé des réserves). Il faut donc bien juger de la pertinence de la méthode au cas par cas. En pratique, on cite souvent en exemple qu’une entreprise « moyenne » rachetée exactement pour sa valeur d’actif net est considérée comme peu chère, tandis que la même achetée pour deux fois son actif net est jugée chère – ce qui incite à utiliser l’ANCC comme référence de base, mais certainement pas comme valeur finale systématique.

 

Pratiques d‘évaluation en France en 2024-2025

En France, les experts en évaluation d’entreprise combinent généralement plusieurs méthodes (patrimoniales, comparables, rendement) pour aboutir à une fourchette de valeur. Cependant, la méthode patrimoniale conserve un rôle central dans de nombreux cas d’évaluation en 2024-2025, avec certaines pratiques bien établies :

Utilisation systématique comme référence : Que ce soit pour une mission de commissariat aux apports, une évaluation amiable entre associés, ou une expertise judiciaire, l’évaluateur commencera presque toujours par calculer l’actif net comptable et l’actif net corrigé. C’est un passage obligé ne serait-ce que pour documenter la valeur de l’entreprise sous l’angle de ses actifs tangibles. Les organisations professionnelles (Ordre des experts-comptables, Compagnie des Conseils et Experts Financiers, etc.) enseignent cette approche comme l’une des trois familles de méthodes incontournables (patrimoine, comparables, rendement).
Sociétés patrimoniales = priorité à l’ANCC : Pour les sociétés dites “patrimoniales” (ex. holdings pures, sociétés civiles immobilières, etc.), les praticiens privilégient clairement la méthode patrimoniale, parfois comme seule référence de valeur . En 2024, on observe même que l’administration fiscale tend à valoriser les titres de SCI ou de holdings principalement sur l’actif net réévalué, avec application de décotes le cas échéant. Un guide fiscal officiel précise que “le choix de privilégier la valeur mathématique s’impose principalement pour les sociétés patrimoniales” . Ainsi, un notaire évaluant des parts de SCI en vue d’une donation calculera la valeur vénale de l’immeuble détenu par la SCI, retranchera le passif et tiendra compte éventuellement de l’impôt latent et des frais de cession, pour aboutir à la valeur patrimoniale des parts.
Combinaison avec méthodes de rentabilité : Pour les sociétés d’exploitation classiques, les experts français en 2024 combinent souvent l’approche patrimoniale avec une approche de rendement (par exemple la méthode des multiple d’EBITDA ou des DCF). Souvent, la valeur retenue résulte d’une moyenne pondérée entre la valeur patrimoniale et la valeur de rendement. Cette pondération peut être 50/50 ou adaptée au cas par cas. Par exemple, le comité d’évaluation des participations de l’État ou les experts judiciaires dans certaines décisions de cours d’appel ont validé des méthodes combinées où l’ANCC est pondéré avec une valeur par les résultats pour refléter à la fois l’actif et le rendement . En pratique transactionnelle privée, un acquéreur examinera toujours le bilan pour s’assurer de ne pas payer moins que l’actif net (sauf cas particuliers) et comparera avec les valorisations obtenues via les multiples de résultats pour ajuster son prix.
Décotes pour minorité et illiquidité : Les praticiens intègrent couramment des décotes sur la valeur patrimoniale selon le contexte de cession. Si l’évaluation porte sur une participation minoritaire (sans contrôle), on applique une décote de minorité car le détenteur n’aura pas le pouvoir de forcer la réalisation des actifs ni le versement des réserves. L’administration fiscale suggère par exemple qu’une décote autour de 20-30% peut traduire le caractère minoritaire . De jurisprudence constante, « lorsque le paquet de titres à valoriser est minoritaire, une décote pour minorité devra être appliquée sur la valeur des parts » . De même, une décote d’illiquidité est envisagée si les titres évalués sont peu liquides (société fermée, secteur peu recherché), afin de refléter la difficulté à revendre rapidement ces parts. Ces décotes se cumulent parfois. En 2024, les experts-comptables disposent de grilles indicatives ou d’études (ex. base de données de la Société Française des Évaluateurs) pour calibrer ces décotes en fonction de la taille de l’entreprise, de la dispersion du capital, etc.
Cas des holdings et sociétés multi-activités : Une autre pratique est la décote de holding pour les sociétés qui ne font qu’empiler des participations sans synergie. On constate sur le marché boursier que les holdings cotées subissent souvent une décote par rapport à la somme de leurs parts (décote de holding de 10 à 30%). Les experts peuvent donc appliquer une décote similaire sur l’ANCC d’une holding non cotée pour tenir compte des coûts de structure et de la non-transparence des actifs sous-jacents . Pour les conglomérats ou groupes diversifiés, on privilégie la méthode par somme des parties : on valorise chaque filiale séparément (souvent par des multiples de résultat ou DCF) puis on ajuste le tout (dette de groupe, décote conglomérat) . L’actif net corrigé consolidé sert alors de référence de cohérence, mais pas de valeur directe s’il y a de fortes disparités entre filiales.
Sources d’information 2024 : Les évaluateurs disposent aujourd’hui de nombreuses sources pour étayer les retraitements patrimoniaux : bases de transactions pour évaluer un actif particulier (ex. valeurs de fonds de commerce par barèmes Interfimo ou CCEF pour les TPE, argus du matériel pour l’occasion, indices immobiliers pour les locaux…), guidelines de place (ex. Baromètre In Extenso pour les PME, publications de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes, études Fusions-Acquisitions). En 2024, on accorde une attention particulière à la conjoncture post-Covid : par exemple, les fonds de commerce de certains secteurs (hôtellerie, restauration) ont vu leur valorisation patrimoniale ajustée à la baisse en 2020-2021 (dépréciation d’actifs, baisse de clientèle), puis en 2022-2023 une reprise graduelle. Les experts actualisent donc leurs analyses avec les dernières données disponibles (chiffres de l’INSEE, tendances immobilières à Paris et en régions, etc.).

En résumé, la méthode patrimoniale demeure une brique essentielle de l’évaluation en France, mais elle est presque toujours accompagnée d’autres éclairages. Comme le résume la Cour de cassation, « la valeur vénale [d’une entreprise] ne peut être dégagée que par l’observation du marché et en recourant aux méthodes utilisées par les acteurs », et l’actif net n’en est qu’un paramètre parmi d’autres . Néanmoins, connaître la valeur d’actif net corrigé est indispensable pour asseoir la discussion sur une base objective et pour appliquer, si besoin, les décotes ou primes appropriées.

Focus : particularités pour les entreprises situées à Paris

Paris occupe une place à part dans l’évaluation d’entreprise en raison notamment de son marché immobilier tendu et de la valorisation élevée des emplacements commerciaux. Voici quelques spécificités à considérer lorsqu’on utilise la méthode patrimoniale pour une entreprise ou un fonds de commerce parisiens :

Valorisation du bail commercial et des emplacements parisiens – À Paris, la plupart des entreprises (commerces, restaurants, bureaux de PME) sont locataires de leur local via un bail commercial 3-6-9. La valeur attachée à ce bail – surtout s’il est ancien avec un loyer inférieur au marché – peut représenter une part majeure de l’actif immatériel. Comme vu dans l’exemple du fonds de commerce, la méthode consiste à valoriser ce droit au bail en fonction de l’écart loyer actuel / loyer de marché, capitalisé sur la durée restant du bail ou via un coefficient d’emplacement . À Paris intra-muros, les loyers commerciaux peuvent varier du simple au quadruple selon les arrondissements et rues. Les emplacements N°1 (grandes artères, quartiers touristiques) commandent des coefficients élevés (souvent 8-10, parfois jusqu’à 12 pour les Champs-Élysées ), traduisant une prime d’emplacement très forte. Cela signifie qu’un commerce bénéficiant d’un loyer très en dessous du marché dans ces zones de prestige verra son actif net corrigé majoré d’une survaleur importante au titre du droit au bail. En revanche, dans des emplacements secondaires ou périphériques, le coefficient peut n’être que de 1 à 4, ou même nul si le loyer est déjà au niveau du marché (pas de surloyer potentiel). Pratique parisienne : les notaires et experts parisiens disposent de données locales (grille des valeurs locatives par quartier, transactions récentes de cessions de droit au bail) pour affiner ces évaluations. En 2024, avec la hausse des loyers de marché post-Covid dans certains quartiers prisés (retour des touristes, etc.), on a vu les valeurs de droit au bail repartir à la hausse après un creux en 2020. Les clauses de plafonnement des loyers (indice ILAT) limitent souvent l’augmentation du loyer contractuel en cours de bail, créant un différentiel grandissant avec le marché : cela augmente mécaniquement la valeur du droit au bail pour le locataire en place. Ainsi, intégrer correctement ce paramètre est crucial dans l’évaluation patrimoniale d’un fonds de commerce parisien.

Valorisation de l’immobilier d’entreprise à Paris – Si l’entreprise est propriétaire de ses locaux à Paris, l’évaluation patrimoniale doit tenir compte du marché immobilier parisien, parmi les plus chers d’Europe. Par exemple, une PME propriétaire de bureaux dans le Marais ou d’une boutique dans le Quartier Latin aura une plus-value latente conséquente sur son bilan. Les experts immobiliers utilisent à Paris la notion de “valeur vénale libre” ou de capitalisation du loyer de marché pour estimer le prix d’un local. Les taux de capitalisation (rendement immobilier) en 2024 pour les commerces parisiens prime peuvent être autour de 3-4%, impliquant une valorisation ~25 à 30 fois le loyer annuel. Cela se répercute en actif net corrigé élevé pour la société propriétaire. À l’inverse, si le local est occupé par un locataire avec un bail ancien très protégé, l’immeuble peut être valorisé occupé avec un rendement plus élevé (donc valeur plus basse) à cause du loyer bridé. L’emplacement géographique précis dans Paris influe via des primes urbaines : proximité d’un métro, quartier d’affaires ou touristique, attractivité commerciale de la rue, etc., tout cela peut justifier d’appliquer soit une prime (valorisation majorée) soit une décote (si par ex. le local est dans une rue en déclin ou en travaux prolongés). En pratique, pour l’ANCC, on prendra la valeur vénale estimée net de frais de vente (les frais de notaire et d’agence, ~7-8%, seraient déduits si on raisonne en net vendeur). On examinera aussi la fiscalité latente : à Paris, les plus-values immobilières des sociétés sont soumises à l’IS 25%, ce qui peut représenter un gros montant vu l’augmentation historique des prix. Pour une valorisation plus fine, certains experts imputent cette fiscalité latente (surtout si l’immeuble est non indispensable à l’activité, comme un appartement loué accessoirement) . D’autres estiment qu’une entreprise qui garde son local pour exploiter n’a pas à subir cette décote fiscale dans la valorisation courante – sauf si on anticipe une cession de l’immobilier séparée.

Prise en compte de la fiscalité locale et des réglementations – Paris a des particularités fiscales qui peuvent impacter l’évaluation patrimoniale : par exemple la taxe sur les bureaux en Île-de-France (TSB) qui concerne les surfaces de bureaux et commerces (montant forfaitaire au m² chaque année) alourdit les charges d’une société immobilière et peut diminuer un peu la valeur nette de l’actif (via une provision pour charge future éventuellement capitalisée). De même, le régime des baux commerciaux urbains impose parfois des investissements à la charge du propriétaire (rénovation de façade selon le PLU, etc.) que l’évaluateur intègrera en passif éventuel. Par ailleurs, lors d’une cession de fonds de commerce à Paris, les droits d’enregistrement (droits de mutation) s’élèvent à 5% environ au-delà de 200 000 € de prix – un coût que l’acheteur doit payer en sus. Même si cela ne change pas la valeur de l’actif net du fonds, c’est un élément de négociation sur le prix net vendeur (un acquéreur cherchera à négocier à la baisse en anticipant ces 5% de frais). Les notaires parisiens veillent aussi au statut du bail (par exemple, un bail précaire ou arrivant à échéance sans droit au renouvellement garanti va diminuer la valeur du fonds, car le repreneur prend un risque sur la pérennité de l’emplacement). Ce type de décote liée à la durée restante du bail ou aux clauses contractuelles spécifiques (plafonnement du loyer de renouvellement, clause recette, etc.) est particulièrement examiné à Paris où les baux commerciaux sont un enjeu majeur de valeur .

Décotes ou primes “urbaines” spécifiques – Le marché parisien peut justifier certaines décotes/primes rarement appliquées ailleurs. Par exemple, la prime de rareté : une entreprise possédant un actif unique en son genre à Paris (emplacement exceptionnel, bien patrimonial classé, licence très convoitée) pourrait voir son actif net valorisé avec une prime car les acquéreurs seront prêts à surpayer pour cet atout qu’ils ne pourraient pas obtenir autrement. Inversement, une décote environnementale peut être envisagée dans un contexte urbain (pollution du site, normes anti-pollution coûteuses à respecter à Paris, restrictions de circulation qui pénalisent un commerce, etc.). De plus, Paris étant un marché très liquide pour l’immobilier et les commerces, l’absence de décote de liquidité est la norme (on considère qu’on pourra revendre aisément). Cependant, pour de très grosses valeurs, une légère prime de contrôle peut exister : acquérir un ensemble immobilier entier à Paris confère un pouvoir (développer, restructurer) qui peut justifier un prix supérieur à la somme des lots pris isolément.

En résumé, l’application de la méthode patrimoniale à Paris requiert un affinage des évaluations des actifs immobiliers et incorporels, en intégrant le contexte local : valorisation du droit au bail selon l’emplacement, estimation précise des valeurs immobilières avec prise en compte des spécificités fiscales (IS, droits de mutation, taxes locales), et appréciation des facteurs de marché parisiens (rareté, prestige, risques urbains). Pour le reste, le calcul de l’actif net corrigé suit les mêmes principes qu’ailleurs. Simplement, les montants en jeu peuvent être significativement plus élevés du fait de la cherté de l’immobilier et du poids de la clientèle locale, ce qui renforce l’importance de bien traiter la survaleur liée à l’emplacement. Les professionnels parisiens de l’évaluation (notaires, experts immobiliers, cabinets spécialisés) publient régulièrement des barèmes et analyses pour guider ces valorisations spécifiques, ce qui permet en 2024-2025 d’avoir des références solides pour objectiver les primes et décotes urbaines à appliquer.

Conclusion

La méthode patrimoniale d’évaluation – ou méthode de l’actif net corrigé – reste en 2025 un pilier de l’analyse de la valeur d’une entreprise ou d’un fonds de commerce. Elle offre une approche rigoureuse et tangible : celle de l’inventaire économique du patrimoine, fournissant un plancher de valorisation en s’appuyant sur le bilan retraité. Pour les vendeurs, c’est souvent un gage de ne pas brader une affaire en dessous de la valeur de ce qu’elle possède. Pour les acheteurs, c’est un moyen de vérifier qu’ils ne surpayent pas des actifs fictifs ou surestimés. Et pour les investisseurs, c’est un indicateur de la solidité intrinsèque, en complément des indicateurs de rentabilité.

Cependant, comme on l’a souligné, cette méthode ne doit pas être utilisée isolément pour fixer le “juste prix” d’une entreprise en activité. Sa force (simplicité, objectivité) est aussi sa faiblesse (statiques, incomplète sur le futur). Les praticiens l’emploient donc toujours en combinaison avec d’autres approches (méthodes comparables, méthodes fondées sur les flux ou les résultats) afin d’avoir une vision à 360° de la valeur. La méthode patrimoniale trouve particulièrement tout son sens pour valoriser des entreprises à fort patrimoine (immobilier, financiers) ou pour évaluer des actifs isolés (fonds de commerce, actifs incorporels spécifiques), mais doit être nuancée par l’examen de la rentabilité dès que l’on estime une affaire destinée à perdurer.

En France, l’environnement juridique et fiscal autour de l’évaluation d’entreprise a évolué pour encourager ces approches multicritères. Les sources expertes (notaires, experts-comptables, guides fiscaux) insistent sur la nécessité de ne pas s’arrêter à l’actif net . Néanmoins, connaître précisément la valeur de l’actif net corrigé demeure un prérequis fondamental de toute négociation sérieuse, ne serait-ce que pour servir de base négociable : généralement, le prix final d’une PME ou d’un commerce se situera au-dessus de l’actif net (en y ajoutant une fraction de survaleur pour la clientèle) sauf si l’entreprise est peu rentable ou en difficulté, tandis qu’un prix très supérieur à l’actif net doit être justifié par des perspectives de profits élevées.

Ainsi, vendeurs, acheteurs et investisseurs ont tout intérêt à maîtriser la logique de la méthode patrimoniale. C’est un instrument d’analyse financière rigoureux, qui, lorsqu’il est combiné à l’étude du potentiel économique, permet de parvenir à une fourchette de valorisation équilibrée. En 2024-2025, dans un contexte de marchés incertains, cette double approche “patrimoine et performance” est plus que jamais de mise pour évaluer au mieux les entreprises et fonds de commerce, à Paris comme dans toute la France.

Sources : Bpifrance Création (guide repreneurs) ; Impôts.gouv (guide évaluation fiscale) ; CCI Paris-IDF (évaluation fonds de commerce) ; Doctrine/AJDI (jurisprudence baux commerciaux) ; Extraits de jurisprudence et pratiques professionnelles 2024.

Maître Nabil Fadli

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